La transparence, oui, mais jusqu’ou ?
La transparence, essentielle mais difficile à appréhender
Entre une tradition tournée vers la confidentialité et une tendance à souhaiter de la transparence pour tout, il existe un éventail de possibilité.
Cela soulève à mon sens une question fondamentale : faut-il tout dire, à tout le monde, tout le temps ? Ma réponse est clairement non.
Cet article a pour but d’exposer quelques éléments concrets pour définir, avec contrôle, le niveau de transparence le plus pertinent en fonction de votre contexte.
Pour s’assurer que l’on parle de la même chose, il me semble important de définir la transparence que j’évoque dans cet article.
Par transparence, j’entends le fait que les informations soient :
- rendues visibles
- compréhensibles par les personnes concernées
- présentées telles qu’elles sont, sans déformation
Bien entendu, une fois cela exposé, il convient de sélectionner convenablement le niveau auquel on place le curseur.
Les pièges liés à la transparence
Il existes des pièges liés à la transparence. Ici, j’aimerais introduire le piège de la surcharge d’informations et celui de l’information incomplète.
Piège de la surcharge d’information
Une transparence mal maîtrisée peut rapidement se transformer en un véritable déluge d’informations, difficile à digérer. Quand le flot de données devient excessif, il finit par étouffer le message : les parties prenantes se retrouvent submergées et ne savent plus comment exploiter ces éléments. Cette surcharge informationnelle nuit paradoxalement à la confiance et complique la prise de décision.
Parmi les effets négatifs de cette « transparence totale », on constate souvent une paralysie décisionnelle due à l’abondance d’options. En exposant chaque indicateur, chaque donnée et chaque alternative, aucun point ne se démarque réellement, rendant le choix plus ardu et contrecarrant l’objectif initial. De plus, l’attention se disperse : le bruit ambiant masque les informations essentielles, ce qui fait perdre le focus sur ce qui compte vraiment.
Piège de l’information incomplète
Le piège de l’information incomplète réside, quant à lui, dans le contexte offert aux parties prenantes pour comprendre correctement l’information rendue transparente.
En effet, toutes les parties prenantes n’ont pas les mêmes connaissances, cadres de références et contextes. Cela signifie que face à la même information, elles peuvent avoir des interprétations très différentes.
Face à cela, il est intéressant de compléter l’information transparente par une explication ou un contexte, qui permet de limiter les biais du consommateur de cette information.
Construire de la confiance avec ses interlocuteurs
Pour que la transparence génère de la confiance, elle doit être calibrée selon les besoins et attentes spécifiques de chaque partie prenante. Un investisseur n'a pas les mêmes besoins informationnels qu'un employé ou qu'un client.
La transparence efficace demande de comprendre :
- Quelles informations comptent vraiment pour chaque audience
- À quel niveau de détail ces informations doivent être partagées
- Quelle fréquence de communication est appropriée
- Quels canaux sont les plus adaptés
- Quelles informations complémentaires sont nécessaires pour permettre la compréhension
Il ne s'agit donc pas de restreindre l'accès à l'information par principe, mais de prioriser ce qui compte. La transparence stratégique consiste à donner aux bonnes personnes, au bon moment, les bonnes informations pour qu'elles puissent jouer leur rôle efficacement.
Transparence Focalisée : Optimiser la Prise de Décision
Pour la prise de décision, la transparence doit être concentrée sur les éléments qui peuvent réellement influencer les choix et actions futures.
Partager des informations sur lesquelles personne ne peut agir ne fait qu'ajouter du bruit au signal.
Quelques critères décisionnels
Une information mérite d'être partagée dans un contexte décisionnel si elle :
- Impacte directement les choix à faire
- Permet d'évaluer les risques et opportunités
- Aide à mesurer les progrès vers les objectifs
- Révèle des écarts nécessitant des corrections
Les bénéfices d’une transparence mesurée
Quand on réussit à placer le curseur au bon niveau, des bénéfices s’ouvrent à deux niveaux.
Le premier se situe dans la confiance entre les personnes et équipes qui bénéficient de l’information.
Le second réside dans une meilleure capacité à prendre des décisions éclairées au bon moment.
En effet, elle peut créer un cercle vertueux de confiance. Les parties prenantes savent qu'elles peuvent compter sur des informations fiables et utiles, ce qui renforce leur engagement et leur coopération, menant à long terme à une relation de partenariat fertile.
Pour la prise de décision, j’identifie deux axes majeurs auxquels contribue la transparence au bon niveau.
Le premier est celui de la détection. En partageant les bonnes métriques et signaux faibles, les problèmes sont identifiés plus rapidement, permettant des corrections avant qu'ils ne s'aggravent.
Le second est l’amélioration de la prise de décisions. Avec les bonnes informations au bon moment, les décideurs peuvent faire des choix plus éclairés et plus rapides.
En s’appuyant sur ces deux axes, on peut alors juger
Avant de rendre transparente toute information, posez-vous ces questions :
- Cela génère-t-il de la confiance ? L'information renforce-t-elle la crédibilité et la relation avec les parties prenantes concernées ?
- Cela aide-t-il à la prise de décision ? L'information permet-elle de faire de meilleurs choix ou de mieux agir ?
Si la réponse est non aux deux questions, la transparence sur cet élément n'apporte probablement pas de valeur et peut même être contre-productive.
La transparence mesurée en pratique
Pour mettre en pratique ces éléments, un moyen simple consiste à cartographier ou référencer dans un tableau les éléments suivants :
- Identifier les parties prenantes clés
- Définir leurs besoins spécifiques en termes d’informations
- Dans le cas où ils participent à des décisions, les lister et identifier les informations nécessaires à cette décision.
- Identifier des modalités de partage appropriées

Exemple de cartographie des parties prenantes et des éléments à leur partager
Le document créé permet de rendre transparent à l’équipe son niveau de communication avec l’extérieur. (Je dois l’admettre, rendre transparent la transparence, c’est cocasse)
Ce document a d’autant plus d’utilité s’il est vivant et évolue au fil du temps en fonction de l’évolution des parties prenantes et de leur positionnement, notamment si certaines sont incluses dans de nouvelles décisions.
Conclusion : Vers une transparence mesurée
Aussi populaire soit le terme, la transparence n'est pas une fin en soi, mais un moyen au service de la confiance et de l'efficacité.
Dès lors, optimiser la transparence ne se réduit pas à la maximiser.
Pour l’optimiser, il est nécessaire d’apporter le juste niveau pour nourrir confiance avec ses parties prenantes et la capacité de prises de décisions.
Ce juste niveau se trouve par une définition claire du niveau de transparence accordé aux différents profils de parties prenantes et de l’expérimentation régulière afin de l’ajuster au fil des évolutions de contexte.